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L’Argile : son usage thérapeutique, ses propriétés et ses bienfaits
L’argile accompagne l’humanité depuis des millénaires, tour à tour matériau de construction, outil de potier et remède naturel. Si son usage thérapeutique s’est longtemps transmis de manière empirique, les recherches récentes confirment aujourd’hui la justesse de ces pratiques. Riche de propriétés physicochimiques uniques, elle s’impose comme un allié précieux en dermatologie, dans le traitement des plaies chroniques et dans de nombreux soins quotidiens. Cet article propose de revisiter l’argile à la lumière des travaux scientifiques contemporains, afin d’en mieux comprendre les mécanismes d’action et de redécouvrir ses bienfaits pratiques à travers des recettes simples et accessibles.
Dans cet article, nous allons, à partir des travaux des docteurs J.C. Charrié et J.C. Lapraz et du Professeur M. Rautureau :
- Expliquer quelle argile on utilise en dermatologie et pourquoi (synthèse d’un travail de recherche)
- Présenter l’intérêt de l’usage de l’argile dans le traitement des plaies chroniques
- Délivrer des recettes et astuces pratiques pour utiliser l’argile sous différentes formes (d’eau argileuse reminéralisante, Masque visage à l’argile pour peau acnéique, cataplasme d’argile pour les inflammations articulaires et traumatismes, dentifrice)
1. Quelle argile utiliser en dermatologie ?
L’objectif est ici de rappeler les connaissances de base sur l’argile et particulièrement sur l’illite composant courant de l’argile verte, disponible dans toutes les pharmacies françaises.
Définition de l’argile
Il n’existe pas une seule argile, mais plusieurs, chacune possédant ses propres propriétés. Leur point commun est d’être présentes dans des roches terreuses, issues principalement de l’altération des feldspaths par l’eau. Humides, elles sont plastiques ; sèches, elles restent douces au toucher, conservent une certaine cohésion et « accrochent » à la langue, traduisant leur affinité pour l’eau. Dans le langage scientifique des minéralogistes, elles appartiennent à la famille des phyllosilicates hydratés.
Une roche argileuse est constituée principalement d’un ou plusieurs minéraux argileux, auxquels s’ajoutent souvent d’autres éléments comme certains micas (l’illite, bien que considérée comme une argile, se rattache aussi au groupe des micas par certaines propriétés), du quartz, du feldspath ou encore des oxydes. Ainsi, le kaolin est une roche composée de kaolinite, un minéral argileux.
Avant d’aller plus loin, il est nécessaire de préciser l’argile étudiée. La complexité du domaine justifie plusieurs classifications. Les premières reposaient sur le lieu d’extraction ou la couleur (critères macroscopiques). Dans notre cas, nous retenons la classification fondée sur les propriétés cristallochimiques, proposée par Caillère dans La minéralogie des argiles et adoptée aujourd’hui par le Groupe français des argiles (GFA) et l’Association internationale pour l’étude des argiles (AIPEA). La nomenclature la plus récente émane du comité international de classification des argiles.
- Les argiles se présentent sous forme de microcristaux de deux micromètres ou moins, organisés en feuillets empilés.
- Ces feuillets peuvent être réguliers (type « monophyllite » avec une équidistance constante) ou présenter plusieurs distances (type interstratifié).
- Chez certaines espèces, les feuillets sont discontinus (« pseudo-feuillets ») ou enroulés.
- La nature et la composition de ces feuillets permettent de distinguer les différents types d’argiles, base de la classification mentionnée.
Structure chimique
Chimiquement, les argiles sont des silicates principalement d’aluminium ou de magnésium. Comme tout minéral, elles sont constituées d’ions. Les cations (Si⁴⁺, Al³⁺, Mg²⁺) s’associent à des anions oxygène (O²⁻) ou hydroxyle (OH⁻), formant un réseau cristallin en feuillet plan.
- Une unité composée d’un silicium et de quatre oxygènes forme un tétraèdre. L’assemblage de tétraèdres crée une couche plane, dite tétraédrique (figure 1).
- Une unité formée d’un aluminium et de six oxygènes ou hydroxyles constitue un octaèdre. Leur regroupement engendre une couche plane, dite octaédrique (figure 2).
L’association de ces couches définit la structure des feuillets, observables au microscope électronique. L’espace situé entre deux feuillets est appelé espace interfoliaire.
Propriétés et réactivité
Les propriétés thérapeutiques dépendent des surfaces des feuillets et de l’occupation de l’espace interfoliaire. Le comportement d’une argile est lié à ses caractéristiques physiques, souvent traduites par des échanges ioniques ou moléculaires sans altération de la structure de base. Ainsi, elles représentent un vecteur efficace de composés actifs.
Pour le praticien peu familier de ce matériau, quelques repères sont essentiels avant toute utilisation :
– la nature de l’argile et ses principales caractéristiques ;
– les éléments compensateurs ;
– la présence éventuelle d’impuretés non argileuses.
Classification des phyllosilicates selon les feuillets
Deux grands types de structures existent :
- Feuillets à deux couches (TeOc) : une couche tétraédrique et une couche octaédrique (exemple : kaolinite, phyllosilicate d’aluminium).
- Feuillets à trois couches (TeOcTe) : une couche octaédrique encadrée par deux couches tétraédriques (exemple : talc, phyllosilicate magnésien).
À ces structures s’ajoutent des variantes :
- Les chlorites : association d’un feuillet TeOcTe et d’une couche octaédrique hydroxylée.
- La sépiolite : structure plus complexe avec des rubans de feuillets TeOcTe disposés en quinconce, formant des pseudo-feuillets fibreux avec canaux internes.
- Le chrysotile : feuillets TeOc enroulés, constituant un type d’amiante.
Notion d’équilibre des charges
La neutralité électrique est indispensable pour définir la formule cristallochimique d’un phyllosilicate. Dans une couche octaédrique idéale, six charges positives sont réparties sur trois sites. Les octaèdres peuvent être centrés sur des ions divalents (Mg²⁺, Fe²⁺…) ou trivalents (Al³⁺, Fe³⁺…).
Dans la nature, les argiles proviennent généralement de l’altération des roches silicatées. Elles présentent donc des défauts de structure, entraînant parfois un déséquilibre électrique. Par exemple, la présence simultanée d’un magnésium et d’un aluminium en site octaédrique réduit la charge attendue de six à cinq. Le minéral retrouve sa neutralité en fixant un ion (Na⁺ par exemple) dans l’espace interfoliaire. On parle alors de montmorillonite-Na ou montmorillonite sodique si la compensation est assurée uniquement par des ions sodium (situation rare à l’état naturel). Ces défauts expliquent l’importance des propriétés de certaines argiles.
Propriétés de l’argile verte à base d’illite
L’illite est une argile dioctaédrique constituée de feuillets TeOcTe à équidistance stable (environ 1 nm). Ses charges tétraédriques sont déficitaires, tandis que les charges octaédriques sont équilibrées.
Elle se présente sous forme de très petites cristallites, conférant une surface spécifique élevée et une grande réactivité physicochimique, intéressante en thérapeutique. La diversité de ses conditions de formation explique ses différents faciès et la variété de ses applications.
En dermatologie, l’illite s’est imposée en raison de ses propriétés, parmi lesquelles :
- une forte capacité de captation des odeurs ;
- une utilisation sous forme de pansements hydratants ;
- la réalisation de pansements souples et étanches (effet barrière antimicrobienne) ;
- l’adsorption et l’entraînement de micro-organismes ;
- la possibilité de transferts et d’échanges moléculaires contrôlés ;
- son caractère naturel à forte résonance psychothérapeutique ;
- son faible coût de production.
2. Pourquoi et comment utiliser l’argile dans les plaies chroniques ?
Le clinicien dispose de différentes utilisations possibles de l’argile selon les stades de prise en charge des plaies chroniques, ainsi que les justifications scientifiques de son emploi.
L’usage empirique de l’argile dans le soin des plaies chroniques est attesté depuis des temps immémoriaux. Afin de vérifier la validité des résultats transmis par la tradition, des chercheurs fondamentaux et des cliniciens ont entrepris depuis plusieurs années des travaux et des études cliniques. Les observations recueillies, conformes aux critères scientifiques actuels, justifient pleinement, comme nous le verrons, la réintroduction de produits naturels dans l’arsenal thérapeutique, après avoir été délaissés faute de reconnaissance de leurs véritables effets.
Nous aborderons ici l’approche clinique des plaies chroniques constituées et leur traitement local, sans nous attarder sur les causes en amont (pathologies artérielles), en aval (affections veino-lymphatiques) ou générales (dénutrition protéique, diabète, grabatisation…).
Le lavage d’une plaie doit se faire au sérum physiologique, et celle-ci ne doit pas être asséchée. Il est essentiel de protéger la peau contre les macérations.
Dans le cas d’une escarre constituée, trois étapes sont indispensables pour relancer le bourgeonnement puis l’épithélialisation :
- l’élimination des tissus nécrosés,
- le contrôle des exsudats,
- ainsi que la maîtrise du développement bactérien, dont la présence régulée est garante de la bonne évolution de la plaie.
Nous allons à présent détailler l’action de l’argile sur chacun de ces paramètres.
Nettoyage d’une plaie :
L’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé (ANAES) recommande l’utilisation du sérum physiologique pour le nettoyage des plaies. Toutefois, lorsque l’eau du robinet est potable, elle peut suffire. Dans certaines régions du monde, l’accès à l’eau potable reste cependant limité en raison de sa rareté : réservée à la boisson et à l’alimentation, elle ne peut alors être utilisée pour l’hygiène des plaies. Cet obstacle peut néanmoins être contourné grâce aux propriétés de l’argile, capable d’assainir une eau non potable. En effet, plusieurs mécanismes expliquent son efficacité :
- Adsorption et absorption : ce sont les principales raisons de ses capacités de purification. Les feuillets d’argile sont constitués d’éléments chimiques sous forme ionique. La neutralité électrique impose un équilibre des charges, mais des substitutions ioniques ou la grande surface spécifique des particules créent souvent un déséquilibre. Celui-ci est compensé par des ions provenant du milieu extérieur. Lorsqu’elle est mise en suspension dans l’eau, l’argile active ainsi des échanges ioniques permettant de piéger un grand nombre d’ions ou de molécules indésirables.
- Propriétés liées à la structure : les particules d’argile, formées par l’empilement de feuillets extrêmement fins (de l’ordre du nanomètre d’épaisseur et de quelques micromètres d’étendue), possèdent une surface active considérable. En suspension dans l’eau, elles fixent ions, molécules polaires ou microorganismes, qui sont ensuite éliminés par une lente décantation, entraînant les impuretés d’une eau contaminée.
- Filtration sur sable et argile : cette méthode, encore employée, fut utilisée dès le XVIIIe siècle pour rendre l’eau potable dans les grandes villes et permit d’éradiquer des maladies telles que le choléra.
Dans notre pratique, nous utilisons l’argile fournie par la société ARGILETZ, choisie car elle dispose d’un agrément alimentaire. Les recherches menées par cette entreprise ont montré une réduction de 92,3 % (1) du nombre de micro-organismes présents dans une solution test, après 3 à 5 ajouts successifs de 25 g d’argile dans 500 ml d’eau distillée contaminée par 1 ml d’une suspension bactérienne titrée à 109 bactéries/ml.
L’utilisation du surnageant d’argile s’effectue de la manière suivante : verser une certaine quantité d’argile dans un récipient d’eau (de 1 cuillère à café pour un verre d’eau visiblement propre, jusqu’à 90 g pour un litre d’eau à purifier). Mélanger, puis laisser reposer au minimum 4 heures. Ce temps permet une hydratation complète de l’argile, l’ouverture des feuillets et la fixation des toxines ainsi que des bactéries responsables de l’insalubrité de l’eau. Après décantation, le liquide surnageant peut être utilisé pour le lavage des plaies.
Protection de la macération, contrôle des exsudats, hydratation de la plaie
Depuis 1962, il est établi que la cicatrisation s’effectue en milieu humide. Depuis lors, la recherche sur les pansements s’est attachée à mettre au point des solutions permettant de maintenir cette humidité dans la plaie. Toutefois, il est également reconnu que la peau saine en périphérie ne doit pas macérer sous l’effet de l’humidité, car cela la fragilise et peut favoriser l’extension progressive de la plaie.
Il est donc essentiel de contrôler la macération autour des plaies. Pour l’éviter, on utilise souvent des pansements dont la capacité d’absorption des exsudats est recherchée. Actuellement, les hydrofibres, les hydrocellulaires et les alginates sont recommandés par l’ANAES : ils assurent une absorption verticale tout en maintenant un environnement humide dans la plaie. Bien utilisée, l’argile peut répondre aux mêmes exigences : grâce à sa capacité d’hydratation et de rétention de l’eau, elle régule les exsudats tout en préservant l’humidité nécessaire au contact de la plaie.
Deux types d’argiles sont utilisables. La plus connue est le talc, une argile blanche, employée notamment dans la « pâte à l’eau », préparation associant glycérol et oxyde de zinc. Une autre option consiste à utiliser une argile riche en illite, sous forme de pâte, pour réduire la macération.
Rappelons que l’action de l’argile découle de propriétés liées à sa structure cristalline. Le terme « argile » désigne des phyllosilicates hydratés, c’est-à-dire des minéraux silicatés constitués de feuillets contenant de l’eau ou des hydroxyles. Leur caractère microcristallisé confère des propriétés de surface déterminantes. La notion de surface concerne les limites des particules : d’une part les faces planes externes, capables d’adsorber diverses entités (ions, molécules, microorganismes), d’autre part les bords des feuillets, où des liaisons ioniques incomplètes se saturent en général par fixation de H⁺ ou OH⁻, mais aussi d’autres ions selon les conditions locales.
Les particules étant composées de feuillets empilés, il existe également des surfaces internes situées entre les feuillets, accessibles seulement après un mécanisme « d’ouverture ». Ce phénomène intervient lors de l’hydratation : l’eau pénétrant entre les feuillets provoque le gonflement de l’argile. À l’inverse, sa déshydratation entraîne un retrait, visible par exemple dans le craquèlement des sols argileux.
On ne doit pas non plus négliger le phénomène d’adhérence, qui permet à de très petites particules (quelques nanomètres, comme certains oxydes) de se fixer sur des surfaces. Les particules d’argile elles-mêmes peuvent adhérer à des structures plus volumineuses, comme des microorganismes ou des membranes cellulaires.
Ces mécanismes relèvent de la physicochimie, et reposent en grande partie sur l’action des ions de substitution et des ions compensateurs interfoliaires. À ce titre, il convient de distinguer deux formes d’eau :
- l’eau d’hydratation des cations interfoliaires, fortement liée, qui ne se libère qu’au-delà de 105 °C mais peut intervenir lors d’échanges ioniques,
- et l’eau interparticulaire, faiblement retenue, qui peut s’évaporer rapidement lors d’un séchage naturel.
Selon le type d’argile (nature des feuillets et ions interfoliaires), les comportements sont variés mais bien documentés par les spécialistes, notamment à travers des courbes d’isothermes d’absorption.
Comme l’a démontré Winter, il est également important de maintenir dans la plaie un environnement chaud, humide et pauvre en oxygène. L’argile contribue à ce milieu favorable pour plusieurs raisons :
- Sa capacité calorifique, liée à l’association eau-argile, assure une réserve thermique qui se dissipe lentement, l’évaporation de l’eau étant limitée par l’imperméabilité de la pâte.
- Les interactions entre l’argile et la zone d’application sont souvent exothermiques, expliquant la sensation de chaleur ressentie par le patient. Cette propriété impose toutefois de la prudence : il est recommandé d’appliquer la pâte d’argile à température ambiante pour éviter une surchauffe de la zone.
Le cataplasme d’argile, exposé à l’air, peut se déshydrater et perdre ses propriétés thérapeutiques. On prévient ce phénomène en recouvrant la face externe d’un film semi-perméable (ou même d’un simple film alimentaire), ou en incorporant des huiles adaptées au mélange. Celles-ci maintiennent la plasticité de la pâte, mais leur usage doit être maîtrisé car certaines, comme l’huile de paraffine, peuvent entraîner une polymérisation excessive du mélange.
Ainsi, une utilisation inadéquate de l’argile peut avoir des effets indésirables : assèchement de la plaie, durcissement excessif du cataplasme, douleurs lors du retrait.
Sa mise en œuvre doit donc être soigneusement contrôlée.
Ainsi, une utilisation inadéquate de l’argile peut avoir des effets indésirables : assèchement de la plaie, durcissement excessif du cataplasme, douleurs lors du retrait. Sa mise en œuvre doit donc être soigneusement contrôlée.
Sur le plan physique, l’argile hydratée présente trois comportements distincts selon son état : fluide, plastique ou solide. Il n’est pas nécessaire de détailler ces notions ici, mais elles définissent des « limites physiques » et des « transitions d’état », entre lesquelles se situent le savoir-faire pratique et le champ de la recherche fondamentale.
Élimination des tissus nécrosés
Cette étape est essentielle, non seulement pour accélérer la bonne évolution de la plaie, mais aussi pour contrôler les mauvaises odeurs et réduire le risque d’infection. En effet, les tissus en nécrose sont riches en bactéries et en réactions biochimiques responsables de la production d’odeurs désagréables.
Pourquoi l’argile est-elle intéressante pour la détersion et le ramollissement des tissus nécrosés ?
L’objectif est de ramollir la nécrose tout en favorisant rapidement l’apparition du sillon d’élimination. Cela permet ensuite de retirer facilement les tissus morts, à l’aide d’une pince ou d’un bistouri, sans douleur pour le patient. Naturellement, la détersion s’effectue en environ trois semaines, mais elle produit alors des tissus putrides, véritables milieux de culture bactérienne, générant des odeurs nauséabondes liées notamment à la formation de cadavérine [NH₂(CH₂)₅NH₂].
Aujourd’hui, les traitements enzymatiques à action protéolytique sont abandonnés au profit des hydrogels (pour les nécroses sèches) ou des alginates (pour les nécroses humides) [ANAES]. Sur le plan clinique, l’usage de l’argile présente un intérêt particulier à ce stade : il permet une détersion atraumatique en moins d’une semaine en moyenne, tout en assurant une excellente maîtrise des odeurs (expérience personnelle).
Deux autres acteurs, les hydrogels et les alginates, partagent certaines propriétés physiques et chimiques avec les argiles. Tous trois présentent une capacité de gélification : par interconnexion entre molécules pour les hydrogels et les alginates, et par interaction entre particules et eau pour les argiles. Cependant, l’argile offre un avantage supplémentaire grâce à ses réactions d’échanges réversibles. Sa déshydratation peut en effet se produire par perte de l’eau interfoliaire liée aux cations compensateurs, sans autre modification de structure. Cet état stabilisé permet ensuite d’engendrer des variations suffisantes pour intervenir efficacement sur les tissus nécrosés.
Élimination de la fibrine
Dans les plaies chroniques de type ulcère de jambe, la détersion consiste principalement à éliminer la fibrine qui se dépose au fond de la plaie et joue le rôle d’une cicatrisation d’urgence. Cependant, cette fibrine présente plusieurs inconvénients : elle accentue l’hypoxie locale, bloque les mécanismes de cicatrisation et favorise la formation d’un biofilm. Ce dernier abrite de nombreux germes, rendant la plaie résistante aux antibiotiques comme aux antiseptiques.
Il est donc nécessaire, pour prévenir la chronicisation et la surinfection de la plaie, d’éliminer la fibrine. L’argile peut, dans ce contexte, apporter un intérêt particulier, pour les mêmes raisons que celles exposées dans le cadre de l’élimination des tissus nécrosés.
Contrôle du pullulement bactérien
Dans le cadre des plaies chroniques, telles que les ulcères de jambe, la détersion vise principalement à éliminer la fibrine qui s’accumule au fond de la plaie. Cette fibrine, bien qu’elle constitue une forme de cicatrisation d’urgence, présente l’inconvénient majeur d’aggraver l’hypoxie locale et d’entraver les mécanismes naturels de cicatrisation. De plus, elle favorise la formation d’un biofilm, abritant des microorganismes qui deviennent résistants aux antibiotiques et aux antiseptiques. Ainsi, pour prévenir la chronicisation et la surinfection de la plaie, il est essentiel d’éliminer cette fibrine. L’argile, grâce à ses propriétés, s’avère pertinente dans ce contexte, pour les mêmes raisons que celles évoquées précédemment concernant l’élimination des tissus nécrotiques.
La détersion permet également de réduire significativement la charge bactérienne et les composés malodorants. C’est par ce mécanisme indirect que l’argile contribue à la gestion de la prolifération bactérienne et des odeurs.
L’argile présente aussi un intérêt direct, notamment à travers deux mécanismes principaux :
Effet barrière
L’application d’argile sur une plaie forme un cataplasme continu, malléable lors de son application et souple face aux contraintes mécaniques liées aux mouvements du patient. Les particules argileuses, composées de feuillets, possèdent une plasticité remarquable : elles se déforment sans rupture et conservent leur forme après la cessation des forces appliquées. Cette propriété, combinée à l’hydratation de la pâte, élimine toute porosité hétérogène et confère au cataplasme une étanchéité aux fluides, notamment à l’oxygène atmosphérique. Cet « effet barrière » isole ainsi les microorganismes, un phénomène comparable à celui observé en hydrologie, où les couches argileuses permettent la formation de nappes phréatiques.
Contrôle des odeurs
Pour qu’une substance soit odorante, elle doit présenter un poids moléculaire modéré, une faible polarité, une solubilité dans l’eau, une pression de vapeur élevée et un caractère lipophile. L’argile, à l’instar du charbon, possède des propriétés adsorbantes qui lui permettent de capter les molécules odorifères. Son effet barrière limite également la diffusion des odeurs en confinant temporairement leur source, conformément à la loi d’action de masse. L’adsorption des molécules odorantes sur l’argile réduit leur impact, et le renouvellement régulier de l’argile permet d’éliminer à la fois ces molécules et les microorganismes responsables. Ce mécanisme améliore significativement le confort du patient, de son entourage et des soignants.
Transport et libération de principes actifs associés
Le pansement peut également servir de vecteur pour administrer des principes actifs bénéfiques à la cicatrisation. Certains produits combinent des agents anti-infectieux, anti-inflammatoires ou des molécules stimulant la cicatrisation. Grâce à ses propriétés d’adsorption et d’absorption, ainsi qu’à ses mécanismes de compensation des charges, l’argile agit comme un réservoir pour ces principes actifs. En milieu dynamique, comme la surface d’un membre traité, la loi d’action de masse favorise la libération progressive de ces molécules vers les tissus, par des mécanismes d’échange ou de transfert. Des produits comme Escargil® (associant argile, gel d’aloès et huiles essentielles) ou Actrys® (composé d’argile, de miel, de cire d’abeille et d’huiles riches en acides gras essentiels) illustrent cette synergie thérapeutique.
3. Recettes et astuces pratiques pour utiliser l’argile sous différentes formes
Recette du masque visage à l’argile pour peau acnéique
Objectif : Purifier une peau à tendance acnéique avant que les boutons ne s’infectent, apaiser l’inflammation et soutenir un assainissement naturel de la peau.
Ingrédients :
- Argile verte
- Eau (de source ou filtrée, non calcaire)
- (Optionnel) Hydrolat (lavande, tea tree ou hamamélis, selon le type de peau)
Préparation :
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- Mélangez 2 à 3 cuillères à soupe d’argile ultrafine avec un peu d’eau (ou d’hydrolat), dans un bol non métallique (en verre, bois ou céramique).
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- Ajoutez l’eau progressivement, jusqu’à obtenir une pâte homogène, lisse et souple (ni trop liquide, ni trop épaisse).
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- Laissez reposer quelques minutes pour activer l’argile.
Application :
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- Appliquez le masque en couche épaisse sur le visage propre, en évitant le contour des yeux et des lèvres.
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- Hydratation constant : le masque ne doit jamais sécher complètement (vaporisez régulièrement un peu d’eau ou d’hydrolat pour garder l’argile humide).
- Hydratation constant : le masque ne doit jamais sécher complètement (vaporisez régulièrement un peu d’eau ou d’hydrolat pour garder l’argile humide).
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- Laissez poser 10 à 15 minutes maximum, puis retirez délicatement à l’aide d’une éponge humide ou d’un gant doux.
Fréquence d’utilisation :
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- En cas de poussée acnéique : 1 masque par jour jusqu’à amélioration visible.
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- En entretien : 1 masque par semaine suffit pour maintenir l’équilibre cutané.
À savoir :
- L’argile peut provoquer une phase de “purge” au début : elle accélère la maturation des imperfections déjà présentes sous la peau. C’est normal.
- Ce n’est pas une aggravation, mais un processus de nettoyage naturel qui nécessite patience et régularité.
Autres usages :
La même pâte d’argile peut être utilisée sur d’autres zones du corps en cas de :
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- rétention d’eau (ex. : lymphedèmes)
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- inflammation locale
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- douleurs musculaires ou articulaires (en cataplasme)
Recette du cataplasme d’argile pour les inflammations articulaires et traumatismes
Indications : ce cataplasme est particulièrement utile en cas de :
- Gonflement du genou ou de la cheville (inflammation articulaire)
- Tendinite
- Traumatisme localisé
- Dégénérescence articulaire liée à l’âge
- Vieillissement articulaire
- Infections localisées (abcès, furoncle)
- Inflammations internes (angine, congestion pulmonaire – voir précautions)
Ingrédients
- Argile verte ou blanche de bonne qualité
- Eau (de source ou filtrée)
- Un linge propre ou une gaze
- (Facultatif) Feuille de chou fraîche (pour un soin prolongé après le cataplasme)
- (Facultatif) Film plastique type cellophane (à utiliser avec précaution)
Préparation
- Préparer la pâte d’argile :
- Mélanger l’argile avec de l’eau jusqu’à obtenir une pâte épaisse, homogène, mais facile à étaler.
- Ne pas utiliser d’ustensiles en métal (préférer bois ou céramique).
- Application :
- Étaler une couche généreuse d’argile (environ 1 cm) sur un linge ou directement sur la zone douloureuse.
- Recouvrir d’un tissu propre ou d’une gaze pour maintenir le cataplasme en place.
- Temps de pose :
- Minimum 20 minutes, jusqu’à 2 heures maximum.
- Éviter de laisser le cataplasme toute la nuit sauf adaptation spécifique (voir ci-dessous).
À éviter : le cataplasme toute la nuit
- Laisser un cataplasme d’argile trop longtemps (surtout s’il est couvert de plastique) peut provoquer une hyperhydratation de la peau.
- Ce phénomène est comparable à la peau fripée après un long bain : cela signifie que la peau s’est trop imbibée d’eau.
- Si vous souhaitez un soin prolongé toute la nuit, remplacez l’argile par une feuille de chou appliquée sur l’articulation après le retrait du cataplasme.
Conseil complémentaire : après avoir retiré le cataplasme d’argile :
- Nettoyez la zone avec de l’eau tiède si besoin.
- Appliquez une feuille de chou légèrement écrasée (pour en libérer les sucs), directement sur la zone concernée.
- Maintenez avec un bandage léger. Ce soin peut être gardé toute la nuit sans risque d’irritation.
Recette de l’eau argileuse reminéralisante
Ingrédients :
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- 1 cuillère à café d’argile verte (de qualité surfine, destinée à un usage interne)
- 1 verre d’eau (de préférence peu minéralisée, à température ambiante)
- Préparation :
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- Verser une cuillère à café d’argile dans un verre d’eau.
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- Mélanger brièvement avec une cuillère en bois ou en plastique (évitez le métal).
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- Laisser reposer le mélange pendant au moins 4 heures — idéalement toute une nuit — sans y toucher.
Utilisation :
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- Après le temps de repos, l’argile se dépose au fond du verre, formant un sédiment.
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- La partie supérieure du liquide, légèrement trouble, est appelée le surnageant : c’est cette eau que l’on boit.
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- Important : buvez doucement sans remuer le verre, pour éviter de remettre en suspension le dépôt au fond.
Pourquoi ?
Cette eau trouble contient des feuillets d’argile très hydratés, riches en oligo-éléments facilement assimilables par l’organisme. Elle est réputée pour ses propriétés reminéralisantes et détoxifiantes douces.
En cure :
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- 1 verre par jour pendant 3 semaines.
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- À renouveler 1 à 4 fois par an, par exemple à chaque changement de saison.
L’organisme prendra ce dont il a besoin, et éliminera naturellement le surplus. C’est une manière simple, naturelle et économique de soutenir son équilibre minéral sans efforts.
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Recette du dentifrice à l’argile – Par le Dr. Réda Bounab
Les dentifrices à l’argile sont de plus en plus à la mode. Mais qu’en est-il de leur efficacité ? Pour répondre à cette question, il faut d’abord se demander ce que l’on attend d’un bon dentifrice.
Trois critères principaux sont classiquement retenus pour évaluer un dentifrice. Les 2 premiers concernent la santé. Le troisième est un critère cosmétique.
- Son pouvoir de polissage. Plus les dents sont polies et lisses, moins il y a de plaque bactérienne. De ce fait, les risques de caries et de gingivite sont réduits.
- Son pouvoir d’abrasion. Ainsi, plus l’abrasion est forte, plus les dents sont abîmées. En d’autres termes, le pouvoir d’abrasion d’un dentifrice doit être le plus faible possible afin de préserver l’intégrité de la surface dentaire ; par conséquent, les risques de sensibilité et de fragilisation de l’organe dentaire seront évités.
- Son pouvoir de nettoyage des tâches. En outre, nos habitudes quotidiennes font apparaître des dépôts sur nos dents (thé, café, tabac, vin rouge, tisanes…). Par conséquent, on attend d’un dentifrice qu’il nous aide à les enlever.
L’argile en dentifrice répond parfaitement aux 2 critères de santé
Tout d’abord, l’argile a un très bon pouvoir de polissage, meilleur que tous les dentifrices à base de silice hydratée (la plupart des dentifrices en contiennent). De plus, elle a un très faible pouvoir d’abrasion, respectant l’intégrité de l’organe dentaire. Par contre, elle est d’efficacité variable pour enlever les tâches incrustées à la surface des dents. Dans tous les dentifrices, le Silicium est le principal élément qui permet le nettoyage et le polissage. Cependant, l’argile n’est autre qu’un silicate d’aluminium.
C’est pourquoi, dans l’argile en dentifrice, c’est surtout de la finesse des grains et le mode de fabrication qui assurent ses caractéristiques de polissage, tout en respectant la santé des dents.
Toutefois, pour ceux qui fabriquent leur dentifrice « maison », attention aux argiles sélectionnées. En effet, certaines contiennent des micas, au pouvoir très abrasif. Les formes ultra-ventilées corrigent ce phénomène par le procédé de séparation des micas des autres silicates plus fins.
De plus, toutes les argiles ne se valent pas. Ainsi, deux types d’argile ont été évaluées comme étant efficaces pour le brossage. D’une part, la bentonite, considérée comme une smectite. D’autre part, le kaolin raffiné.